Dehors, il fait un vent à déraciner la bosse d’un chameau. Comment occuper une enfant de 6 ans avec un temps pareil ? Gail, maman anglaise d’un garçonnet de 7 ans, se pose la même question.
Nous trouvons la solution ensemble. Et si nous nous rendions au Centre Ali Baba, à vingt minutes à pied de la Marina ? Ali Baba est un grand espace (sous une voûte qui veut se donner l’apparence d’une grotte) où les enfants peuvent escalader, sauter, courir … bref, devenir des sportifs de haut niveau, dans un univers chatoyant de plastique et de mousse. Un genre de Quick puissance 20 pour enfants à l’énergie puissance 20 sur l’échelle de Richter.
Sur la longue allée du bord de mer, les palmiers plient sous le rih (vent tunisien – écriture phonétique). L’extravagante branche d’un conifère (peut-être un araucaria surnommé le désespoir des singes) tombe des cieux et Sophie la ramasse pour s’en faire un bracelet vert étincelant d’écailles.
Les enfants se tiennent la main pour ne pas s’envoler. Parfois, ils se séparent pour nous cueillir des fleurs jaunes, sauvages et délicates. Entre chaque palmier s’intercale un banc entièrement recouvert de faïences aux tons tranchés (bleu indigo/jaune moutarde).
Sur le chemin, un chaton famélique, sorti d’on ne sait où, s’approche de Gail. cette dernière a toujours quelques gourmandises dans un sachet pour les félins errants, comme lui. Grâce à quelques croquettes, elle devient sa plus belle rencontre (providentielle et gastronomique) de la journée. Désormais, à nos côtés, gambadent joyeusement deux enfants et un petit chat domestiqué …
Près du centre Ali Baba, nous saluons les éléphants d’Hannibal*, majestueux avec leurs défenses et leurs corps en plastique froid.
A l’intérieur du parc, pour les enfants déchaussés, c’est la super excitation et pour nous, attablées devant les grilles qui nous séparent des jeux, c’est la super détente. Nous papotons et, ce faisant, Gail améliore son français et moi mon anglais. De temps en temps, les enfants nous extirpent de notre bulle linguistique hermétique à tout stress pour nous demander de l’eau, des gâteaux, des cacahuètes …
Bien loin de moi l’idée de comparer ces chers bambins à des singes/monkeys gesticulant derrière leur haute cage, quoique …
17 heures : Il est temps de partir. Nos petits primates se rechaussent. Avant d’affronter le vent, toujours aussi colérique, nous admirons, dans l’obscurité de la grotte, des mannequins, figés dans leur attitude d’artisans (tanneurs de cuir) et vêtus d’habits rudimentaires.
Sophie a épuisé tout son stock d’énergie. De singe, vif et espiègle, elle est devenue un escargot mollasson, adhérant élastiquement à l’asphalte. J’ai même l’impression que par moment, à défaut d’avancer, nous reculons !
Pour 9 dinars par enfant pour un après midi complet, le Centre Ali baba est un lieu que, Gail et moi, nous adorons… autant si ce n’est plus que les enfants … pour des raisons bien différentes. Là bas, nous paressons autant qu’ils s’agitent … et ce sans le moindre complexe.
* Hannibal Barca, né en 247 avant Jésus-Christ à Carthage (en Tunisie) serait à l’origine de la deuxième guerre punique que les Anciens appelaient « la guerre d’Hannibal ». A la fin de l’année 218, il quitte l’Espagne avec son armée, traverse les Pyrénées puis les Alpes pour gagner le Nord de l’Italie, sans réussir à prendre Rome, son plus grand ennemi. Il parvient toutefois à maintenir une armée dans la cité romaine durant plus d’une décennie.____________________
Texte écrit en février 2012